Quinze sièges étaient à pourvoir dans des organismes dépendant de cette commission, au prorata des différents groupes politiques : conseils d’administration de Radio France, France Télévisions, du Centre national du cinéma et de l’image animée… Avec 125 députés, le Rassemblement national pouvait en revendiquer trois.
Selon nos confrères de Libération, les parlementaires auraient fait en sorte que le RN obtienne les sièges les moins stratégiques, à l’image du siège au Conseil supérieur de l’AFP, dévolu à Bruno Bilde.
Il reste que la nomination du député de Liévin a de quoi étonner et inquiète les journalistes. Le conseiller spécial de Marine Le Pen, qui fait toujours office de « maire-bis » d’Hénin-Beaumont, bien qu’il n’y soit plus élu depuis les régionales de 2021 pour cause de cumul des mandats, est notoirement connu pour être un adversaire acharné de la presse.
122 droits de réponse adressés à La Voix du Nord depuis 2014
Dans un article de 2021 de La Revue des médias de l’INA consacré aux relations du RN d’Hénin-Beaumont avec La Voix du Nord, Bruno Bilde révélait qu’il aurait rêvé d’être journaliste… C’est sans doute la raison pour laquelle le député RN et homme-orchestre du RN héninois multiplie les droits de réponse adressés au quotidien nordiste.
Cette semaine, le 122ᵉ droit de réponse adressé par Steeve Briois ou Bruno Bilde à La Voix du Nord est paru à la suite d’un article publié quelques jours plus tôt sur la crise à l’Escapade. Depuis les élections régionales de 2015, les journalistes de l’agence héninoise de La Voix du Nord n’ont plus de table de presse au conseil municipal, ne reçoivent plus les dossiers ni les invitations.
Pire, le RN a multiplié les procès contre La Voix du Nord et les attaques ad hominem dans le bulletin municipal ou sur les réseaux sociaux, souvent suivis d’un flot de commentaires injurieux des supporters de la municipalité d’extrême droite.
Inédit par sa violence, le traitement réservé par le RN à La Voix du Nord a conduit plusieurs journalistes de l’agence locale à partir, épuisés par les pressions.
Les syndicats de journalistes dénoncent une provocation
Plusieurs syndicats de journalistes ont réagi à l’annonce de la nomination de M. Bilde au Conseil supérieur de l’AFP.
Dans un communiqué, la CFDT Journalistes a dénoncé « une provocation » :
« Enfant, Bruno Bilde rêvait d’être journaliste. Pourtant, adjoint au maire d’Hénin-Beaumont, il n’eut de cesse de cibler et d’intimider les correspondants de la Voix du Nord par des méthodes à la limite de la diffamation. Plus tard, cet honorable personnage s’en prit à Mediapart, lançant une campagne de boycott envers les reporters de ce média, les empêchant de suivre les conférences de presse ou les meetings du RN. […]
Donc, cet immense chantre de la liberté de la presse va siéger dans le conseil supérieur d’une des plus grandes agences mondiales, où il donnera son avis sur la couverture de l’actualité nationale et internationale [...], sur la façon dont les journalistes doivent travailler, sur les évolutions futures de l’information »…
Sur la même ligne, le Syndicat national des journalistes (SNJ) a déploré « la désignation d’un élu d’extrême droite, dont le parti attaque l’AFP de manière récurrente », ajoutant que la nomination de M. Bilde « envoie un signal très négatif. Et ce, d’autant plus que cet élu est lui-même connu pour les méthodes d’intimidation et de chantage vis-à-vis des journalistes et des médias qu’il déploie depuis dix ans ».
Pour le syndicat, il y a urgence à mettre enfin un terme à la tutelle du politique et au système de nominations politiques dans les médias.
Source : Liberté Actus
https://liberte-actus.fr/politique/vie-politique/article/l-etonnante-nomination-de-bruno-bilde-au-conseil-superieur-de-l-afp