La Fédération européenne des journalistes a déclaré dans un communiqué publié mardi 13 juin, relayé par le syndicat national des journalistes, SNJ, que la France souhaiterait « affaiblir » le texte européen sur la liberté des médias au nom de la « sécurité nationale ». Pour cause, le dernier projet de compromis, daté du 7 juin, prévoit une exception « de sécurité nationale » à l’interdiction générale d’utiliser des logiciels espions à l’encontre des journalistes, sans garantir la protection des sources. Les syndicats y voient une « atteinte au secret des sources des journalistes en Europe et plus globalement à la liberté d’informer et d’être informé ». Le SNJ pour sa part condamne l’attitude de la France l’interpelle sur son rôle de « garant des libertés fondamentales », en tant que, « pays de la Déclaration des Droits de l’Homme ».
La position de la France pourrait changer la donne
Le 2 mai, avec le soutien de l’ensemble des grandes organisations européennes de radiodiffusion et d’édition, la FEJ a appelé l’UE à aller plus loin dans la protection des sources et protection contre les technologies de surveillance à l’épreuve du temps. Il s’agit de la thématique du fameux article 4, qui a pour le SNJ un rôle majeur, car il est attaqué de façon récurrente, et qu’il s’agirait de la « pierre angulaire de la liberté des médias ».
« L’introduction par la France du paragraphe 4, qui stipule que « le présent article est sans préjudice de la responsabilité des États membres en matière de sauvegarde de la sécurité nationale », transforme en effet les protections initialement prévues en coquilles vides », a affirmé la FEJ dans son communiqué. Il rajoute qu’ « une telle exemption de "sécurité nationale" sans garantie des droits fondamentaux néglige l’importante jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) ». Cette dernière aurait indiqué, selon la FEJ que le fait de vouloir garantir la sécurité nationale ne « peut rendre le droit communautaire inapplicable et ne dispense pas les États membres de leur obligation de se conformer à l’État de droit ». L’argument de la France serait alors irrecevable, par rapport aux lois européennes.
La FEJ monte au créneau
« Il est, en effet choquant, que les États membres de l’UE affaiblissent encore des dispositions importantes sur la protection des sources des journalistes et la protection contre les technologies de surveillance », a déclaré Maja Sever, présidente de la FEJ d’après le communiqué. Elle a rajouté qu’il s’agissait d’ « un nouveau coup dur pour la liberté des médias ». La Fédération européenne du journalisme n’était déjà pas entièrement comblée par la proposition initiale, elle l’est encore moins avec cette possible exemption.
D’après ce communiqué, cette dernière supprime la liste exhaustive des « crimes » établie par la Commission pour la remplacer par la liste établie dans la décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen. Elle élargit massivement le champ d’application pour justifier le déploiement de logiciels espions contre les journalistes et les sources journalistiques, ce qui est vivement critiqué par les syndicats de journalistes. La FEJ déplore qu’aucune mesure capable de sauvegarder les droits fondamentaux, comme l’exigent le Traité sur l’Union européenne et la Charte des droits fondamentaux, ne soit réfléchie pour palier cela. La Fédération réclame de ce fait un champ de protection plus large, notamment grâce à un système d’autorisation judiciaire exante des mesures de surveillance.
Pour se faire entendre, la FEJ, ainsi les organisations qui soutiennent cette démarche, ont d’ores et déjà annoncé qu’elles enverront une lettre à « tous les acteurs impliqués dans les négociations en cours ».