Une rédaction en « état de choc » chez BFMTV, relève Franceinfo. Depuis un mois, une enquête interne a été ouverte à BFMTV, première chaîne info de France, en raison de soupçons visant le présentateur Rachid M’Barki qui aurait diffusé des sujets ayant subi une influence extérieure. Le journaliste a été suspendu le 11 janvier 2023 par le directeur de la chaîne, Marc-Olivier Fogiel.
D’après le journal, Rachid M’Barki a proposé des brèves, soit des images commentées en direct en plateau, sans se référer à sa hiérarchie et au mépris de la ligne éditoriale de BFMTV. Plusieurs thèmes identifiés : le Qatar, le Soudan, les oligarques russes et d’autres pays africains notamment.
C’est un journaliste de l’équipe de l’enquête baptisée « Story Killers », Frédéric Métézeau, qui a tiré la sonnette d’alarme. Cette enquête a réuni, pendant plus de six mois, cent journalistes travaillant pour 30 médias internationaux. Comme c’est le cas avant toute publication, Frédéric Métézeau fait part à Marc-Olivier Fogiel, directeur de la chaîne BFMTV, des découvertes afin de recueillir sa réaction.
Interrogé par sa direction, Rachid M’Barki, 54 ans, présent à l’antenne depuis la création de BFMTV en 2005, a reconnu des opérations « d’entrisme » et confessé une éventuelle « erreur de jugement journalistique » qui l’aurait conduit à "rendre service à un ami ».
C’est lors de leur infiltration, en Israël, de « Team Jorge », une structure spécialisée dans l’influence, la manipulation électorale et la désinformation, que les investigateurs ont découvert « une vidéo du 19 septembre 2022 dans laquelle on voit Rachid M’Barki, le journaliste de BFMTV, faire part, images à l’appui, des difficultés que connaît l’industrie du yachting à Monaco après la mise en place des sanctions contre les oligarques russes. » Cette séquence a ensuite été isolée et rendue virale sur les réseaux par « Team Jorge », structure dirigée par Tal Hanan, ancien militaire de l’armée israélienne qui se fait aussi appeler "Michael", "Joyce Gamble" ou "Coral Jaime".
Rachid M’Barki recevait ces informations biaisées de Jean-Pierre Duthion, entrepreneur expatrié en Syrie de 2007 à 2014, « lobbyiste » et « mercenaire ». Selon le témoignage d’un autre journaliste de BFMTV, la pratique ne serait pas isolée. Il affirme avoir été contacté par Jean-Pierre Duthion dès 2020. Un an plus tard, le lobbyiste lui aurait précisé : « Je suis missionné pour payer des journalistes pour faire passer des informations… Je connais vos salaires. Je sais qui peut en avoir besoin, lui aurait-il dit. Grâce à moi, ils peuvent s’offrir des vacances, car je sais que les fins de mois peuvent être difficiles », relève Franceinfo. De son côté, Jean Pierre Duthion affirme n’avoir jamais rémunéré un journaliste.
La structure fantôme « Team Jorge » crée des avatars « des gens qui n’existent pas, mais qui disposent d’une apparence réelle sur internet et de centres d’intérêts crédibles » à l’aide d’un logiciel appelé « Aims » pour « Advanced Impact Media Solutions », qui signifie "solutions avancées pour un impact médiatique". « Ces faux profils publient leurs soi-disant opinions dans l’espoir d’influencer sur les plus grands réseaux sociaux ».