Calais : un communiqué pour redorer l’image de la ville

, par Club de la presse hdf

Début octobre, alors que la jungle de Calais comptait environ 8000 exilés, deux habitants de la ville qui se font connaître sous le nom de « simples Calaisiens » prenaient la plumes pour alerter par un communiqué les médias sur l’image de Calais dans les journaux.

Selon eux, la ville reste belle, « sa plage magnifique et ses éléments d’architecture remarquables ». Ils regrettaient que « [leur] ville [ne soit] connue que pour sa population de migrants et la prétendue insécurité qu’elle entraîne. » Ils ne minimisaient pas la présence de migrants ni les difficultés en découlant, surtout pour les chauffeurs routiers qui se rendent en Angleterre, mais ils trouvaient que leur image médiatique est disproportionnée par rapport à la réalité.

La présence des migrants bénéficie même à certains commerces : « les cafés, baraques à frites et autres restaurants ne désemplissent pas. Migrants et bénévoles viennent s’ajouter aux calaisiens habitués. Les commerces de bricolage, de sport(vélos, tentes…) et les hôtels [qui hébergent les compagnies de CRS] se portent merveilleusement bien. ». Des magasins ferment dans le centre ville, comme dans toutes les grandes ville. D’ailleurs, « ce déclin progressif s’est amorcé avec l’ouverture d’une immense surface commerciale à l’extérieur de la ville, la cité Europe et l’ouverture de nouveaux espaces en périphérie.  »

La faute selon eux à « une minorité d’habitants, pas tous calaisiens d’ailleurs, [qui] véhicule des propos alarmants en évoquant un taux de délinquance impressionnant, des agressions quotidiennes, des dégradations multiples… »

Les faits divers repris en boucle, donnent « l’impression d’être en zone de guerre ». Mais « Il n’en est pourtant rien. Pas de bombes, pas de hordes de migrants dans nos maisons, pas plus de risques si on traverse la ville à pieds, même de nuit. Nous le savons, nous y vivons.  »

Cette image négative, relayée massivement par les médias sape « l’attractivité de [la] ville ». Les médias ne sont pas les seuls en cause. La construction du mur, la pose de grillage et de barbelés jouent. « Faire de calais une forteresse n’est pas une solution. [...] Pour rappel, les touristes ne sont venus à Berlin que pour voir le mur au sol, pas avant… »

Envoyé à prés de 80 journalistes régionaux, ce communiqué se terminait par une invitation à rencontrer ses auteurs et à « découvrir [la] ville et ses richesses ». Il se terminait par un clin d’œil à « la bonne réputation des gens du Nord dont [les auteurs font] partie ».

Envoyer un tel communiqué en tant que simple citoyen, sans l’appui d’une association, peut-il avoir une influence sur les médias ? Force est de constater que depuis trois semaines, date d’envoi du mail seul Nord Littoral l’a évoqué dans un article intitulé « Le message d’amour de Calaisiens à leur ville ». Il a été aussi repris tel quel par des blogueurs. Publié sur facebook par un des auteur, il a été partagé plus de 500 fois et a reçu beaucoup de soutien dans les commentaires. Quelques insultes aussi...

Si ce communiqué a inspiré des journalistes pour écrire des articles plus positifs, ils restent noyés dans la masse. La moindre recherche autour de l’image de Calais, son traitement médiatique renvoi soit sur des articles de journaux évoquant des faits divers ou le démantèlement de la jungle, soit sur des blogs d’Extrême-droite.

Calais, « ses éléments d’architecture remarquables ».

Chers médias, Calais va bien merci…

Nous sommes de simples citoyennes et citoyens de Calais et nous voulons faire entendre une autre voix que celle de cette minorité d’habitants qui crie très fort à l’exaspération.

Nous vous remercions pour votre inquiétude mais Calais va bien, ou du moins pas aussi mal que ce que l’on voudrait vous faire croire.

Calais est une belle ville, bordée par une plage magnifique, avec des éléments d’architecture remarquables et de nombreux espaces culturels (musée, cité de la dentelle, le Channel…).

Mais aujourd’hui, notre ville n’est connue que pour sa population de migrants et la prétendue insécurité qu’elle entraîne.

Certes, depuis quelques années, un nombre croissant de personnes souhaitant se rendre en Angleterre se heurte à notre frontière naturelle, le détroit du Pas de Calais. Ils se retrouvent bloqués, parqués aujourd’hui dans ce qu’il est convenu d’appeler la « jungle », un bidonville créé par la mairie et l’Etat en périphérie de la ville.
Depuis quelques mois, une minorité d’habitants, pas tous calaisiens d’ailleurs, véhicule des propos alarmants en évoquant un taux de délinquance impressionnant, des agressions quotidiennes, des dégradations multiples… Bref, en regardant les journaux, on a l’impression d’être en zone de guerre. Il n’en est pourtant rien. Pas de bombes, pas de hordes de migrants dans nos maisons, pas plus de risques si on traverse la ville à pieds, même de nuit. Nous le savons, nous y vivons.

Ce qui est difficile à Calais, c’est cet impact médiatique tellement négatif. Les médias ne relayent qu’une voix, largement déformée par la haine et souvent, par le racisme. Les modérateurs sur les réseaux sociaux ne font pas le tri dans les propos racistes et calomnieux, pire relayent ces propos et leur donnent une visibilité exacerbée.
Loin de nier les problèmes bien réels de notre ville, nous en avons assez de devoir nous justifier auprès des gens qui vivent loin : non, nous ne risquons pas plus notre vie à Calais le soir qu’à Lille, Paris ou Toulouse.

Oui, le soir sur la rocade, il faut être très prudent. Les centaines de CRS qui remplissent nos hôtels depuis des mois (et qui, soit dit en passant, permettent à l’économie hôtelière d’être florissante) créent un climat de tensions et quelques migrants, désespérés par leur situation, semblent prendre tous les risques pour tenter de monter dans les camions. Oui, certains routiers ont, de fait, de grandes difficultés à assurer leurs livraisons.

Mais en dehors de ces problèmes bien concrets, non, l’ensemble des commerces ne souffre pas.

D’une part, nombre d’entre eux bénéficient de cette présence migratoire : les cafés, baraques à frites et autres restaurants ne désemplissent pas. Migrants et bénévoles viennent s’ajouter aux calaisiens habitués. Les commerces de bricolage, de sport (vélos, tentes…) et les hôtels se portent merveilleusement bien.

D’autre part, oui, certains commerces du centre-ville sont effectivement obligés de fermer, mais combien de centre-ville ont-ils perdu leurs commerces de proximité à cause de grandes surfaces commerciales ? Des réfugiés, on en voit très peu en ville, puisqu’ils sont invités à rejoindre la jungle, loin du centre-ville.
On peut relever que ce déclin progressif s’est amorcé avec l’ouverture d’une immense surface commerciale à l’extérieur de la ville, la cité Europe et l’ouverture de nouveaux espaces en périphérie.

Les loyers prohibitifs du centre-ville y sont également pour quelque chose. S’agirait-il alors d’un problème de mairie ?

Ce qui est difficile à Calais, c’est le manque d’attractivité de notre ville.
Depuis le début de l’année 2016, on inonde des terrains protégés, on abat des arbres et on fait pousser des grillages. Ce n’est pas dans toutes les villes de France que l’on rase des espaces verts pour (soi-disant) avoir plus de visibilité…
Toutes les villes de France n’ont pas la chance d’avoir un mur de 4m qui enfermera bientôt ses citoyens dans leur propre ville. Faire de calais une forteresse n’est pas une solution. Il a été prouvé que les grillages et les barbelés n’empêchent pas les intrusions ! Alors à quoi servent-ils ? Pour rappel, les touristes ne sont venus à Berlin que pour voir le mur au sol, pas avant…

Alors oui, Calais est en difficulté, mais comme tant d’autres villes de notre région et de notre pays.
Le pouvoir d’achat des Français baisse, notre industrie dentellière n’est plus qu’un musée, il n’y a plus de compagnie maritime française dans notre port, le plus fréquenté de France…

Venez nous voir, venez discuter avec nous, venez découvrir notre ville et ses richesses, venez vous rendre compte de la bonne réputation des gens du Nord, car nous en faisons partie.

Nous sommes fiers d’être calaisiens. Malgré tout.

Maxime et Céline


 

 

 

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