Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi, leader des études sectorielles, estime que la crise sanitaire risque bien d’aboutir à une restructuration massive des médias, suite à une baisse du marché publicitaire estimée au minimum à -12% pour 2020. Cette situation menace de nombreux titres de presse, notamment les journaux locaux les plus fragiles, comme le quotidien Paris Normandie, qui a demandé sa liquidation judiciaire.
Dans un premier temps, de nombreux éditeurs de médias ont pu s’appuyer sur les mesures de chômage partiel qui permettent de faire prendre en charge par l’État une partie de leur manque à gagner. Mais avec des recettes publicitaires à -70 ou -80% dans les télévisions privées, comme à TF1 ou M6, et des parutions qui s’interrompent dans la presse, comme à L’Équipe Magazine, le chômage partiel ne suffit pas pour ces médias.
Des budgets communication coupés
Selon Alexandre Mirlicourtois, la flambée des audiences ne doit pas faire illusion. « Prises dans la tourmente, l’un des premiers réflexes des entreprises c’est de couper dans leur budget ’com’ », explique-t-il. Pour autant, la publicité extérieure, média traditionnel le plus touché, pourrait se rétablir plus rapidement que les autres. Il estime notamment que la proximité avec ses lecteurs de la PQR lui sera profitable dans la phase de redémarrage et que la radio, une des grandes perdantes avec la chute de recettes sur les tranches horaires matinale et les trajets domicile-travail, pourra rebondir le plus vite.
« Sans intervention massive de l’Etat, nombre de médias traditionnels seront balayés, ou au mieux absorbés par des intérêts industriels et financiers puissants. Il serait bien dommageable pour l’information que cette restructuration accélère la concentration et la puissance des aspirateurs à budgets de pub comme Google », note Alexandre Mirlicourtois.
En attendant, Franck Riester, ministre de la Culture, a annoncé qu’il étudierait un crédit d’impôt pour les médias. Mais le gouvernement travaille surtout à un plan global en faveur de la presse. Un plan comprenant non seulement des mesures fiscales de ce type, mais aussi des solutions pour assurer la continuité de la distribution des journaux en sauvant Presstalis, leader de la distribution de la presse, et en permettant une restructuration des imprimeries ou la mise en place de fonds stratégiques en faveur de la presse.
M.P