« France Soir » : le projet de la dernière chance et histoire de gros sous à l’AFP - La Lettre du Club 64 - novembre 2004

Cet été, la vie des médias avait été riche en rebondissements. Le début de l’automne n’est pas mal non plus, avec un patron bagarreur à « France Soir » et des affaires de gros sous à l’AFP.

Dans notre dernière édition (La Lettre » n°63, septembre 2004), nous en étions restés à la « vente bidon » de France Soir. Nous avions alors découvert un personnage mystérieux, Jean-Pierre Brunois, à la tête d’une certaine Financière Hoche. Sa seule expérience dans les médias est d’avoir travaillé dans quelques radios locales. Le propriétaire italien du titre, Poligrafici Editoriale, comptait néanmoins lui céder 51 % du capital du journal qui restera pour toujours attaché au nom de Pierre Lazareff. Devant la méfiance du comité d’entreprise (manque de moyens financiers, absence de projet éditorial...), la vente avait finalement capoté.

Quelques jours plus tard, Poligrafici Editoriale sortait un nouveau candidat de son chapeau, avec qui les discussions avaient débuté il y a plusieurs mois, mais mis de côté pendant l’épisode Brunois. Cette fois-ci, la vente a été conclue et l’homme d’affaires franco-égyptien Rami Lakah (qui se fait aussi appeler Raymond à l’occasion) est le nouveau patron du titre. Curieux personnage également que ce Rami Lakah. Ancien député égyptien, il a racheté en janvier 2004 la compagnie aérienne Euralair, aujourd’hui en faillite. Celle-là même qui est soupçonnée d’avoir fait bénéficier le couple Chirac de voyages gratuits (des faits qui se sont produits avant le rachat).

Par ailleurs, selon Libération, l’homme « traîne quelques casseroles : en 2001, plusieurs banques égyptiennes lui reprochaient des emprunts non remboursés. Et la presse égyptienne le soupçonnait de vouloir chercher refuge à Paris. » Rami Lakah a aussi pour particularité d’avoir le sang chaud. Il y a quelques jours, une vive discussion avec deux conseillers, qui avaient conclu un contrat avec l’ancienne direction, s’est terminée à coups de poing, avec intervention de la police...

Un « tribun autoproclamé »

Reste que, contrairement à Jean-Pierre Brunois, Rami Lakah a présenté un vrai projet rédactionnel et de redressement, plutôt ambitieux. C’est lui déjà, avec sa société Lafayette Presse, qui avait sorti une édition unique en français du magazine américain Newsweek. Il compterait en faire un titre régulier.

Pour France Soir, il a le projet d’en faire un « Parisien en plus gai » et « en mieux », avec un objectif de diffusion de 74 000 exemplaires en 2005 et de 120 000 en 2007 (contre 67 000 sur 2003-2004). France Soir se déclinera également dans une version quotidienne en anglais, baptisée France Soir International, vendue en France à 1,5 euro. C’est André Bercoff, jusqu’ici directeur de la rédaction, qui a été chargé de lancer ce nouveau titre.

Mais Rami Lakah a également recruté à l’extérieur. Ainsi, Jean-François Kahn, par l’intermédiaire de sa société République Communication, sera conseiller de la rédaction. Pour la petite histoire, l’arrivée de « JFK » a été saluée par un éditorial au vitriol d’André Bercoff, qui assène : « France Soir n’est pas à l’agonie, ses journalistes (...) n’ont pas sollicité tel ou tel tribun autoproclamé ». Ambiance... Valérie Lescable, journaliste à la radio économique BFM (ancienne rédactrice en chef du Nouvel Economiste) prend, quant à elle, la direction de la rédaction.

Surprimes pour gros contrat

A l’AFP, c’est une histoire de gros sous qui a mis le feu aux poudres. Choqués par le versement de surprimes de 30 000 et 35 000 euros à deux cadres du service photo, le personnel a voté, à près de 93 %, une motion de défiance envers sa direction.

Ces primes, qualifiées d’« exceptionnelles » par la direction, récompensaient selon elle la signature d’un gros contrat. Un mouvement de grève de plusieurs jours s’en est suivi, dont les revendications ont vite dépassé la question de ces primes. La titularisation d’une trentaine de personnes employées en CDD sur des postes permanents était ainsi demandée.

Bertrand Eveno, président de l’AFP, a finalement accepté de mettre fin aux primes discrétionnaires, ce qu’il refusait catégoriquement au début du conflit. L’accord signé le 12 octobre avec les syndicats (excepté Sud, qui demandait la « restitution des bonus ») prévoit également vingt embauches de journalistes en CDI d’ici la fin de l’année et une dizaine au premier trimestre 2005.

L. F.


 

 

 

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