La place du réel à l’heure de la téléréalité ? « Je ne crois pas que les docu-drama comme « l’Odyssée de l’espèce » soient l’avenir... » - mars 2005

L’édition 2005 du Festival international du grand reportage d’actualité vient de s’achever au Touquet Paris Plage. Une sélection de 87 films a été projetée sur grand écran. Tous ces documentaires ont été diffusés sur les chaînes de télévision françaises et étrangères ces dernières années. L’occasion de faire le point sur la place des « Écrans du réel » dans les médias aujourd’hui. L’avis de Georges Marque-Bouaret, délégué général du FIGRA.

Le documentaire de société est-il en perte de vitesse dans les médias français ?

On ne peut pas dire cela. Que ce soit sur les chaînes hertziennes et du câble..., le documentaire a toujours sa place. On ne peut pas dire non plus qu’il y en a moins qu’avant, mais leurs heures de programmation sont excessivement variées.
Dans la course à l’audimat, les programmateurs ne misent plus sur le grand reportage aujourd’hui - à part quelques émissions célèbres - et, d’autres programmes, plus populaires, les remplacent. Les documentaires de société sont dès lors relégués à des heures de plus en plus tardives, parfois à 1h30 du matin !
Je ne crois pas en l’audiométrie. Cela fausse tout le système d’appréciation de la télévision et cela donne des programmateurs qui n’y croient plus. Sinon, ils ne seraient pas obligés de planifier des « docu-drama » à la manière de « L’Odyssée de l’espèce » - certes intéressants&nbsp- en disant « c’est ça l’avenir, la panacée ». ça, je n’y crois pas !
Je crois plutôt qu’il y a des sujets d’actualité, de société, des grands reportages qui plaisent au public et qui mériteraient d’être diffusés à des heures plus décentes. D’autres chaînes, en Belgique, en Suisse, en Angleterre le font et elles n’en sont pas mortes.

Qu’est-ce qui a changé ?

Ce qu’on appelait le grand reportage d’actualité, assurés par des rédactions dans des chaînes ou des agences de presse, tend à disparaître progressivement. Mais ce n’est pas très inquiétant parce qu’il est remplacé par le documentaire de société ou d’information. Les journalistes sont en fait devenus des réalisateurs. Les bases du documentaire sont les mêmes que celles du grand reportage d’actualité... C’est simplement plus technique.
La seule chose qui change, c’est que ces films sont de plus en plus écrits. La qualité n’en est que renforcée... mais la production est toujours aussi importante.

Y a-t-il beaucoup de concurrence ?

Il y a effectivement beaucoup de monde pour peu de place. Compétition entre les chaînes, diversité de leurs lignes éditoriales... : les places sont chères. D’autant qu’une fois le film diffusé, on ne le voit plus. J’aurai tendance à croire que les programmateurs travaillent souvent avec les mêmes producteurs...
Sans parler des difficultés de financement. C’est la raison pour laquelle cette année le Figra a rendu hommage au producteur Jean-Michel Carré. Le producteur, c’est l’âme du documentaire ! Avec le meilleur sujet de film au monde, sans producteur, le film ne sortirait pas. Il y a l’histoire, l’écriture et il y a le talent de conviction du producteur qui est essentiel. Donc oui, il y a beaucoup de monde sur les rangs et la difficulté économique aboutit à un écrémage.

Les sujets traités sont-ils différents aujourd’hui ?

Cette année, le monde, au sens large, dans sa dimension géographique, a semble-t-il plus intéressé les producteurs et les diffuseurs. Avant, on avait tendance à retrouver des sujets qui avaient marqué l’actualité de chez nous, proches de chez nous.
Et la qualité des films est plus grande. Il y a vraiment de très très grands sujets proposés en France.

Propos recueillis par Barbara Six


 

 

 

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