La Voix du Nord, histoire secrète - 05/09/2005 Un livre enquête décapant de Frédéric Lépinay

C’est un livre passionnant à bien des égards que vient de publier Frédéric Lépinay. Cette « histoire secrète » de la Voix du Nord, le quotidien auquel il a lui-même collaboré jusqu’à une période récente, est en fait une enquête fouillée sur les origines de la Voix jusqu’à la veille de la prise de contrôle par le groupe belge Rossel. Sa sortie ne pouvait mieux coller avec l’actualité. Aujourd’hui journaliste indépendant, Frédéric Lépinay a créé, pour l’occasion, la maison d’édition « Les Lumières de Lille », un titre qu’il avait déjà utilisé pour une publication périodique d’investigation.

« L’histoire du journal lillois, explique l’auteur, ne se limite pas aux quinze dernières années de violentes turbulences financières qui ont secoué l’entreprise et démoralisé une grande partie de son personnel. En fait, les mauvaises actions ont commencé dès 1944 ».

La séance de dédicaces du livre de Frédéric Lépinay a connu un beau succès au Club, lundi 5 septembre.
Photo : Gérard Rouy

On l’aura compris, Frédéric Lépinay revient sur le conflit qui, dès la Libération, a opposé les dirigeants de « La Voix du Nord » aux résistants qui ont créé et animé la feuille clandestine à partir d’avril 1941. L’air et le refrain son connus. Les couplets beaucoup moins. Dès les premières pages, nous apprenons que le titre revendiqué par Nathalis Dumez (co-fondateur avec le policier lillois Jules Noutour)à son retour de déportation appartient en fait juridiquement à l’avocat Me Jean Brackers d’Hugo, décédé en 1965.

Photo : Gérard Rouy

Si les motivations de Dumez et Noutour, en créant cette publication dans la clandestinité, ne font pas de doute, on ne sait pas pourquoi ils ont choisi de l’appeler « La Voix du Nord », un titre récurrent dans la presse nordiste. On le trouve pour la première fois en 1846 ! Lorsque Me Brackers d’Hugo lance sa propre "Voix du Nord" en 1939 (une publication monarchiste), le titre en est déjà à sa quatrième utilisation. Il y en aura bien d’autres. Mais, souligne malicieusement Frédéric Lépinay, il est impossible de savoir si les droits de propriété intellectuelle liés au titre déposé par l’avocat royaliste ont bien été cédés à la "Voix du Nord" que nous connaissons. Ainsi, ces droits resteraient-ils aujourd’hui acquis aux descendants de Brackers d’Hugo jusqu’en... 2036 !

Photo : Gérard Rouy

« La situation est inédite, écrit Lépinay. Un des plus grands quotidiens de France ne serait pas pleinement propriétaire de son titre pour avoir refusé de reconnaître les droits de ses fondateurs il y a plus de 60 ans ».

Au long de ses 349 pages, le livre détaille et décortique les grandes étapes, en donnant force détails sur les faits et les hommes. Les vérités occultées depuis la prise en main en 1944, la constitution du groupe multimédia, le RES, la filiale Age Conseil, l’arrivée de la Socpresse, puis de Dassault, etc. On n’avait jamais rien lu d’aussi précis sur La Voix. Ces éléments d’enquête sont essentiels pour connaître les rouages et les dessous d’un grand titre comme celui-là. Le lecteur appréciera de savoir qui est et comment fonctionne un média qui leur livre l’information chaque matin. "Comment peut-on,interroge l’auteur, se référer aux valeurs de la Résistance quand on cache la vérité sur son propre journal ?"

Philippe Allienne

La Voix du Nord - Histoire secrète - Ed Les Lumières de Lille - Frédéric Lépinay - août 2005

Après une rencontre dédicaces au Club de la presse, le 5 septembre, Frédéric Lépinay participera à un débat autour de son enquête, toujours au club,le 22 septembre. Le livre est disponible en librairie et au Club.


 

 

 

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