Message de Mohamed Benchicou (février 2006)

De sa prison d’El Harrach, à Alger, Mohamed Benchicou a écrit ce message de soutien à son confrère Bachir Larabi et au combat pour la liberté de la presse. Il a été lu lors du rassemblement du 30 janvier, devant la Maison de la presse Tahar Djaout.

« Ils ont essayé, hier, d’éteindre notre plume avec le souffle de la mort et ont dû abdiquer devant son immortalité. Ils ont essayé, hier, d’éteindre notre plume avec le vent de l’exil et ont trébuché sur nos racines. Regardez-les qui s’acharnent aujourd’hui à vouloir l’éteindre avec le glaive du juge et le froid de la prison. Alors, levons nous, Bachir mon frère, et annonçons à partir de nos geôles, toi, de ton cahot d’El Bayadh, moi, de ma cellule d’El Harrach, au milieu des fils de notre peuple annonçons aux cœurs qui battent pour le destin algérien, annonçons aux montagnes fatiguées et aux mémoires outragées, à notre terre orgueilleuse et aux printemps inexorables, à nos femmes résolues et aux hommes humbles, annonçons que la flamme de la plume libre attisée par les braises des serments faits aux martyrs a déjà triomphé du froid de la prison. Jurons de nos bagnes, Bachir, que nous la garderons allumée tant que durera la nuit sur notre peuple, car notre plume lui appartient et que nous lui sommes redevables de mille lumières . Elle l’éclairera obstinément comme un phare insolent planté dans l’océan du malheur pour indiquer les rades de l’espoir ».

Solidarité avec Mohamed Benchicou
18 journalistes algériens menacés de prison

Condamnés en première instance à des peines comprises entre deux et douze mois de prison ferme, dix-huit journalistes algériens risquent d’être arrêtés et d’être emprisonnés en ce début d’année. Les verdicts des procès en appel vont être rendus dans les prochaines semaines. Tous exercent ou exerçaient dans la presse privée.

« Cette remise en cause de la liberté de la presse, pour partielle qu’elle soit, obtenue au prix fort du sacrifice de près de 120 journalistes, a commencé par l’arrestation de Mohamed Benchicou qui entame son vingtième mois de prison », rappelle le Collectif pour la liberté de la presse en Algérie.

Directeur du quotidien « Le Matin », qui a cessé de paraître le 24 juillet 2004, Mohamed Benchicou est aussi l’auteur d’un livre mettant en cause le président algérien : « « Bouteflika, l’imposture algérienne ». Il a été condamné en juin 2004 à deux années de prison ferme pour « transfert illégal de capitaux et infraction à la législation régissant le marché des changes » (lire le rappel des faits) . Mais depuis son incarcération, il a été extrait plus de 34 fois de sa cellule pour être présenté devant le tribunal et répondre de nouvelles plaintes pour délit de presse.

Outre les dix-huit condamnations à des peines de prison ferme recensées en 2005, un récent bilan dénombre des dizaines de journalistes sanctionnés par des peines de prison avec sursis. Il révèle aussi les cas des correspondants locaux livrés, dans le silence, à une justice expéditive ; les sociétés éditrices croulant sous des amendes astronomiques, acculées à la faillite en raison du chantage à l’impression, à la publicité ; les menaces de suspension planant sur des publications.

Ces poursuites et condamnations pour délit de presse se font en application de la réforme du code pénal de 2001. L’affaire Benchicou en est le révélateur principal. Aujourd’hui, des instances internationales reconnues (ONG, Parlement Européen, FIJ, etc) considèrent le journaliste Mohamed Benchicou comme un prisonnier d’opinion.

Dans un communiqué daté du16 janvier, le collectif pour la liberté de la presse en Algérie « réitère son appel en direction des élus et responsables politiques entretenant des relations avec le pouvoir algérien à travers divers accords économiques au niveau national et européen, ainsi qu’à l’opinion nationale et internationale afin d’agir immédiatement » .


 

 

 

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