« L’association a été créée en 1995 par une visiteuse de prison, qui se rend compte que la situation des femmes dans ces univers fermés est difficile. Depuis, nous avons suivi plus de 1000 dames dans les murs et à l’extérieur, dont 232 en 2008 ». En quelques mots, Myriam Plainemaison, vice-présidente de Parcours de femmes, montre l’ampleur du travail réalisé par l’association depuis 14 ans. « On a un double rôle : pendant et après la détention. En prison, on rencontre, on échange et on dialogue avec les détenues. A leur sortie, on les accompagne dans leur projet de réinsertion, pour trouver un logement, et on les aide dans leurs relations avec les professionnels. En quelque sorte, nous sommes la passerelle entre le « dedans » et l’extérieur ».
Témoignage d’une ex-détenue
- Myriame Plainemaison, Vice-présidente de "parcours de femmes" et Karine Kajak, secrétaire générale de l’association
Cette aide, Catherine l’a connue à sa sortie définitive de la prison de Bapaume, il y a un peu plus de deux ans. Elle a accepté de témoigner dans un petit film réalisé par Justine Pluvinage, entrecoupé de photographies prises durant sa détention, qui illustrent « un moment de fête, des bonheurs et des souffrances qu’on partage », au même titre que les parloirs avec les enfants qui sont autant de « 14 Juillet ». Des mots forts, marqués par dix années d’incarcération à Versailles « où je me suis battue pour assurer le bien-être de mes enfants. Là-bas, il n’y avait pas d’association. Au bout d’un an, j’ai demandé de l’aide. On m’a dit : « vous ne comprenez pas qu’en prison, c’est normal de tout perdre ». Il m’a fallu aussi neuf longs mois pour voir mes enfants ». A Fresnes, la mère de famille vivra « les pires instants de [sa] vie ». Elle finira sa détention à Bapaume où elle préparera sa sortie.
Tandis que par étapes la caméra la rhabille, ses paroles la mettent à nu dans cette vidéo très émouvante. « Depuis ma sortie, la nuit, c’est la prison et la mort » exprime-t-elle, seule face à la cinéaste. (…) Je ne sais même plus ce que ça veut dire d’avoir une vie sociale. A l’intérieur, je vis comme une sauvage. Pourtant, j’aimerais avoir des amis mais je ne sais même plus comment on fait (…) L’essentiel, c’est que mes enfants soient heureux. Je me sens coupable mais ce n’est pas facile d’être une mère coupable. »
Face aux membres du Club, Catherine parle avec des termes simples de sa vie d’aujourd’hui. « Un an après le film, il n’y a rien qui a changé. On ne vit pas dix ans en prison sans laisser des marques. Il a fallu que je réapprenne à vivre. »
« Tisser un lien avec l’extérieur »
Ce qu’elle a pu faire grâce au soutien de Parcours de femmes. « J’avais eu connaissance de l’association en détention. Lorsque je suis sortie en conditionnelle, je leur ai adressé une lettre pour faire part de mon projet professionnel. Parcours de femmes m’a accompagné et surtout trouvé un logement. Cet appartement m’a permis de me réfugier, de découvrir un autre monde ».
- Justine Pluvinage, réalisatrice du court-métrage projeté ce soir là
Les bénévoles et les trois salariées de Parcours de femmes se battent tous les jours pour assurer ce suivi à l’intérieur et à l’extérieur par des aides diverses, du soutien, des visites au sein des établissements pénitenciers avec des « dames qui ont fait la demande aux conseillers de réinsertion ». Selon Arlette Biart, « l’objectif est de tisser un lien avec l’extérieur », afin de préparer leur réinsertion dans la société. Comme tant d’autres d’ex détenues qui ont contacté un jour cette association unique en France.
Catherine s’est battue pour retrouver sa dignité de femme et se reconstruire. Elle qui se définit comme faisant « partie des accidents de la vie » tient aujourd’hui sa revanche : « C’est la société de crédit qui a racheté mon ancienne maison pour payer le montant de ma dette. Je viens d’acquérir une nouvelle maison non loin de celles de mes enfants et de mes petits-enfants en Normandie. J’ai ma propre grand-mère comme référence. J’ai envie de lui ressembler. Je vais refaire ma vie de maman-mamie. » Une nouvelle histoire à écrire, qui n’effacera pas pourtant ce terrible « jeudi où ma vie a été balayée d’un coup avec mon placement en garde à vue puis le dimanche, mon incarcération en prison. »