Benoît Christal, diplômé de l’ESJ Lille en 1999, a vu du pays depuis ses années étudiantes. Devenu grand reporter pour TF1/LCI en 2005, il couvre notamment les élections américaines en 2008 et 2010, les révolutions arabes en 2011 ou encore la crise ukrainienne en 2014. En parallèle, il se focalise fortement sur le Moyen-Orient, plus précisément en Irak et Syrie où Daesh est implanté.
Le djihadisme, la guerre ainsi que les traumatismes qui en découlent, il connaît. Pour en témoigner, le roman lui apparaît comme le médium adéquat. Sur la base de faits réels, la découverte d’une liste de djihadistes auprès d’un garagiste qui travaillait pour Daesh, et les attentats qui ont meurtri la France en 2015, le reporter construit une intrigue mêlant services secrets occidentaux et agents doubles. Leur objectif ? Mettre la main sur cette fameuse liste. « J’ai d’abord pensé à un essai, sous forme de carnet de notes, » raconte l’auteur, « puis, j’ai rapidement su que le roman était la forme la plus appropriée pour emmener le lecteur, pour pouvoir montrer le lien entre les événements complexes en Syrie et en Irak, et les attentats du 13 novembre ».
Un hommage personnel à ceux qui ont fait face à l’islamisme
« Ce roman, très personnel, est un hommage à un grand ami », confie le reporter quelque peu ému. Cet homme, qui a découvert la fameuse liste, c’est Bakhtiyar Haddad. journaliste et fixeur kurde irakien, tué en juin 2017 à Mossoul par l’explosion d’une mine.
Plusieurs journalistes l’accompagnaient : l’un d’entre eux, Stephan Villeneuve, a succombé à ses blessures. Véronique Robert, avec qui il travaillait pour l’émission « Envoyé spécial », a été grièvement blessée. Leur confrère du Figaro Samuel Forey, lui, en est sorti indemne. Bakhtiyar Haddad est mort en exerçant son métier à 41 ans.
À la fois traducteur, guide et protecteur, pour les journalistes étrangers, le fixeur est une aide indispensable à la réalisation de reportages. Il mesure les risques, possède de nombreux contacts, et sait où et quand se déplacer. « On remet sa vie entre ses mains », confesse Benoît Christal. « Il est déjà arrivé que des fixeurs trahissent un journaliste, si leur famille est menacée par exemple ». En somme, la confiance et le choix de cet auxiliaire constituent les points cardinaux sur secteur difficile.
« Ce livre, c’est aussi le récit de la rédemption », poursuit l’auteur, « comment se remettre d’une épreuve très dure telle que la guerre ou la perte d’un proche ». Les conflits, révolutions et crises humanitaires marquent les esprits. Benoît Christal considère son ouvrage comme un hommage à ceux qui ont fait face à l’islamisme : non seulement les victimes des attentats du 13 novembre, mais aussi les Irakiens et Syriens qui, armes ou micro à la main, ont combattu Daesh.
Face au djihadisme
« C’est notamment grâce à un journaliste français que l’on a appris l’assassinat de ressortissants occidentaux par des djihadistes français », rappelle le journaliste. La quête de vérité justifie encore la prise de risque sur le terrain. L’islamisme - et ce qu’il engendre - ne s’attache pas exclusivement aux grandes organisations connues à ce jour. Ceux qui les composent ne sont pas fidèles et peuvent se déplacer, changer d’allégeance ou encore créer une nouvelle organisation. Pour que la vérité ne s’efface pas devant la propagande d’islamistes 2.0, maîtrisant internet et les réseaux sociaux, « les rédactions doivent continuer à envoyer des journalistes sur le terrain », insiste le grand reporter, qui a vécu de près la fermeture du bureau de TF1 à Jerusalem.
L’auteur, précise joyeusement qu’il ne s’agit pas d’un livre sombre, bien au contraire. « Bakhtiyar était quelqu’un de joyeux », se remémore-t-il, « c’est ainsi qu’il faisait face à l’adversité ». L’amitié, la fraternité et l’humour pour lutter contre ceux qui sèment la peur et la douleur, voilà le message que souhaite partager à présent Benoît Christal.
Valentin BRIARD