Un nouvel Ebdo en kiosque

, par Faouzia

On dit la presse en crise et pourtant les lancements de médias se multiplient en ce début janvier. Loopsider, média vidéo mobile et social, porté par Johan Hufnagel, ex-directeur des rédactions de Libération, a démarré le 10 janvier, la télévision alternative « Le Média » a diffusé son premier JT le 15 janvier… et Ebdo a sorti son premier numéro en kiosque le 12 janvier. Moribonde la presse ? Laurent Beccaria, cofondateur et directeur de la revue XXI depuis 2008 et de la revue 6 mois, cofondateur d’EBDO avec Patrick de Saint-Exupéry, est venu présenter son nouvel hebdomadaire avec Haydée Saberan, journaliste, lors du Regards de presse du 15 janvier.

Un hebdomadaire imprimé, vendu en kiosque et par abonnement, prix unitaire 3,5€, jusque-là c’est classique. Mais alors, qu’est ce qui le différencie de tous ses concurrents ? « Avec Ebdo, on veut proposer un journal d’information accessible » explique Laurent Beccaria. « Il y a un trou noir entre la presse d’actualité qui demandent un niveau d’expertise très pointu pour être comprise dans son intégralité, et les médias plus populaires qui sont plus froids, axés sur le service ». « Au lieu de nous donner des clés de compréhension, le flux d’information nous noie » peut-on lire dans le manifeste d’Ebdo (https://www.ebdo-lejournal.com/manifeste), qui a pour ambition d’être un journal à haute valeur ajoutée, curieux et généreux.


Autre constat, fait par Haydée Saberan : « la plupart des journalistes se sentent indépendants, mais on ne peut pas nier le problème de l’appartenance de la majorité des médias à des grandes fortunes qui les voient comme des moyens d’influence ». Ebdo se veut donc indépendant et libre, exit la publicité qui oblige à avoir des cibles pour séduire les annonceurs. Exit aussi les magnas de la presse, le journal a mené une campagne de crowdfunding couronné de succès sur la plateforme KissKissBankBank (409000€ récoltés pour un objectif de 150000€ ; 5960 pré-abonnés en deux mois) pour permettre son lancement. L’équilibre financier reposera donc uniquement sur les ventes en kiosque et les abonnements. Une formule originale a été retenue avec un prix d’abonnement graduel, qui encourage les lecteurs à payer 15€ par mois qui est le prix d’équilibre, mais permet de s’abonner à partir de cinq euros par mois sans justificatif ou de payer 25€ pour aider le journal.

Un journal sans ligne éditoriale

Pour Haydée Saberan, le plus important est d’en finir avec « la condescendance. Pour comprendre ce qui se passe, on ne peut pas prendre les gens de haut ou de loin ». On comprend alors la volonté de bâtir une équipe ancrée régionalement. Sur les 55 membres de la rédaction, 25 sont des journalistes implantés en province, comme Haydée Saberan, ancienne correspondante de Libération à Lille. Le meilleur moyen pour sortir de la tendance « parisianiste » des grandes rédactions, avec une précision importante « j’apporte ce que peut apporter un correspondant régional, mais je suis une journaliste de la rédaction habitant en région. Vivre en province donne un regard différent ». La différence viendra de la façon de traiter les sujets et notamment de s’éloigner volontairement des buzzs. Laurent Beccaria précise « il vaut mieux se focaliser sur l’information profonde. Dans Ebdo on va regarder plus loin pour trouver des sujets qui rendent compte de nos vies. » Comprendre donc qu’Ebdo ne suivra pas le feuilleton de la présidence du PS, ne commentera pas le fait qu’Alain Juppé ne renouvelle pas sa cotisation chez LR… Le journal revendique d’ailleurs de ne pas avoir de ligne politique ou de ligne éditoriale, « On veut être humaniste, sans œillères et sans présupposé. On ira chercher les informations ailleurs, sous le radar, en partant de la base ». Exemple, dans le numéro 0 (non-commercialisé), la question du glyphosate était traitée par le biais d’une rencontre avec des étudiants d’un lycée agricole et relatait la vision contradictoire de ces futurs agriculteurs, coincés entre la rentabilité et l’envie de produire mieux.
La proximité avec le lectorat se développe aussi avec une initiative appelée la source, qui invite les abonnées à participer à la création du journal. Ces derniers peuvent proposant des idées, s’ils ont un domaine d’expertise se signaler comme « ressource » potentielle que les journalistes pourront solliciter, ou encore partager un témoignage.

Objectif viabilité

Laurent Beccaria affiche une certaine modestie, « on a pas de certitudes ». Dans l’idéal Ebdo vise 60000 abonnés et 20000 ventes en kiosque par numéro.Le premier numéro a été tiré à 200000 exemplaire, répartis sur 22000 points de vente. Une phase d’ « arrosage » nécessaire au démarrage du journal pour sentir « ou cela va prendre ». Lors de la rencontre, le 15 janvier, les ventes du premier numéro étaient estimés entre 50 et 80 000 ventes et la barre des 10000 abonnés avait été franchie. Effet nouveauté oblige, les ventes vont baisser et devrait se stabiliser pour le 4ème numéros. La couverture du premier numéro est consacrée à une enquête sur la SNCF, Laurent Beccaria promet des sujets surprenants pour les suivants. Rendez-vous le 19 janvier pour découvrir le numéro 2 en kiosque.

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