En congrès fédéral à Lille
Le SNJ-CGT fait escale au Club de la presse

Le numéro deux des syndicats de journalistes, le SNJ-CGT, a tenu son congrès fédéral les 29, 30 et 31 mars à Lille. Il a élu son bureau national qui a porté Emmanuel Vire à sa tête. Journaliste à « Géo-Prisma », le nouveau secrétaire général succède à Dominique Candille (« L’Equipe »). Lundi 29 mars, en début de soirée, le congrès s’est déplacé au Club de la Presse pour un échange avec les confrères et consœurs de la région. Une occasion, pour le Club, de déployer sur la façade de son siège lillois, la banderole de solidarité avec les deux journalistes de France 3 otages en Afghanistan.

Photos Gérard Rouy

« Nous n’avons pas choisi d’organiser notre congrès à Lille par hasard  » a dit Dominique Candille, lundi dernier au Club de la presse. Elle s’est notamment réjouie de l’existence d’une section du SNJ CGT dans la région, depuis plusieurs années.

« La presse en danger »

Face à un public nombreux où l’on notait notamment la présence de Bertrand Bussières, du SNJ, , elle a dressé un rapide panorama de la situation de la presse en France. Deux jours plus tard, son successeur au secrétariat général, Emmanuel Vire, dressait le même constat à l’occasion d’une conférence de presse. « C’est par le rapport de force et dans la lutte que nous parviendrons à faire changer la volonté du gouvernement et des grands groupes », a-t-il déclaré, dénonçant notamment la concentration des titres de presse écrite au sein de quelques groupes et « les attaques contre l’audiovisuel public ». Pour lui, « la presse française est en danger ».

« On est face à une attaque sans précédent de la presse », a renchéri Jean-François Téaldi (France Télévisions), secrétaire général adjoint du syndicat. « On le voit sur l’audiovisuel public, France Télévisions ou RFI (...) repris en main par le pouvoir politique avec la nomination des PDG par le président (de la République) et la possibilité de les démettre à tout moment, et on le voit dans la presse écrite avec les concentrations », a-t-il dit.

« Nous n’avons pas en France, ni en Europe, des seuils anticoncentration qui permettent de faire vivre le pluralisme (...) et empêcher des situations de monopole », a-t-il poursuivi, citant les groupes Lagardère, Bouygues et Dassault. « Dans la PQR (presse quotidienne régionale), on est dans un régime soviétique avec souvent un seul titre par région. A part Berlusconi en Italie, la France est un cas unique dans le monde », a encore estimé Jean-François Téaldi.

La banderole de solidarité avec les confrères de France 3 a été accrochée en présence des congressistes. (Photo Gérard Rouy)

Il a appelé « la gauche », si elle revenait aux affaires, à « voter des lois anticoncentration », à « rénover les aides à la presse » pour garantir son pluralisme et à revenir sur le processus de nomination des patrons des entreprises de l’audiovisuel public. Le SNJ-CGT a par ailleurs réaffirmé son opposition au projet de réforme du statut de l’Agence France-Presse (AFP) initié il y a un an par le PDG partant, Pierre Louette. Le syndicat redoute à terme une « privatisation » de l’agence. Il a dénonce comme une « provocation » les propos du ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, qui a appelé, le 29 mars, le successeur de Pierre Louette à "mener à bien la réforme" de son statut « obsolète ».

Dérégulation dans les médias européens

Lors du passage des congressistes au Club de la presse, le président de la Fédération européenne des journalistes (FEJ), Philippe Leruth, a lui aussi fait part de son inquiétude pour la presse dans l’ensemble de l’Europe. «  La dérégulation sociale fait rage dans les médias en Europe  », a-t-il lancé. Quelques chiffres, disponibles sur le site internet de la FEJ, en témoignent :

- Le nombre de correspondants étrangers en poste à Bruxelles est tombé de 1150, en 2005, à moins de 900 aujourd’hui. Résultat : la couverture des activités des institutions européennes se fait de plus en plus par internet.
- L’audience de la presse écrite quotidienne française a reculé de 6,9% entre 2008 et 2009. Le même constat peut se faire pour la presse écrite quotidienne en Europe.
- L’audiovisuel public est sous pression en Europe. La BBC veut se séparer d’un quart de son personnel. En Belgique, la télévision publique flamande est dans le même cas de figure.
- A la BBC toujours, les journalistes ont été fermement invités à se manifester sur les réseaux sociaux, ou à quitter l’entreprise.
- Les journalistes finlandais ont perdu leur combat sur les droits d’auteurs contre le géant Sanoma. L’obligation, pour les journalistes, de céder leurs droits pour tous médias, tous supports confondus existant ou à venir, est déjà largement présente en Europe. Elle frappe notamment les jeunes journalistes.

La définition du journaliste

Philippe Leruth a soulevé un autre problème : la « difficulté croissante à recruter des jeunes journalistes. » Il a aussi avoué la «  difficulté à redéfinir notre stratégie face à la montée en puissance d’internet et des nouveaux médias de communication ».

A ce sujet, le président de la FEJ s’est dit partisan, « à l’heure où tout le monde peut s’affirmer journaliste grâce au web, de rechercher une meilleure définition de qui est journaliste ».

Philippe Allienne (avec Afp)

Deux nordistes au Bureau

Le Bureau national du SNJ-CGT est composé de douze membres. Parmi eux,on note deux journalistes du Nord, membres du Club de la presse : Jean-Gérard Caillaux (secrétaire de rédaction au mensuel « Témoins »), reconduit au poste de trésorier, et Ludovic Finez (rédacteur à Liberté Hebdo).

Outre le nouveau secrétaire général, Emmanuel Vire, les autres membres sont : Jean-François Téaldi, secrétaire général adjoint (journaliste à France Télévision – pôle France 3), Dominique Candille (« L’Equipe »), Maria Carmona (AFP), Elisa Drago (RFI), Michèle Herzbe rg (« Les Dernières Nouvelles d’Alsace »), Laurent Mardelay (« Le Figaro »), Thomas Ribolowski (Editialis), Jean Tortrat (Pôle TV – Prisma), Alain Vernon (France 2).

Ludovic Finez, adhérent du Club de la presse et membre du Bureau national du SNJ-CGT et Philippe Leruth, président de la Fédération européenne des journalistes (Photo Marc Dubois)

Solidarité avec les otages de France 3 et Mumia Abu Jamal

En ouvrant son congrès fédéral à Lille, lundi 29 mars, le syndicat des journalistes SNJ-CGT a placé ses travaux « sous le signe de la solidarité » avec les deux reporters de France 3 détenus comme otages en Afghanistan depuis trois mois.

Le soir même, en accueillant les congressistes au club de la presse, Philippe Allienne les a invité à assister à l’accrochage de la banderole des clubs de la presse. Cette banderole flotte dorénavant sur la façade du club du Nord – Pas de Calais.

Philippe Allienne, Président du Club de la presse et Jean-François Téaldi (France Télévisions), secrétaire général adjoint du syndicat (Photo Marc Dubois)

Dans ce même registre de la solidarité, il a également été beaucoup question de la situation de Mumia Abu-Jamal, dans le couloir de la mort depuis 28 ans, en Pennsylvanie (USA). « Il est le plus vieux prisonnier politique américain », a affirmé Jacky Hortaut, animateur du collectif pour la défense de Mumia.

Journaliste noir-américain, il a été condamné à mort en 1982. Accusé du meurtre d’un policier, il a toujours clamé son innocence. Il est aujourd’hui unefigure emblématique du combat contre la peine de mort. «  Par deux fois, grâce à la mobilisation internationale, il a échappé à l’exécution  », a rappelé Jacky Hortaut. « Mais aujourd’hui, il est au bout des recours  ».

Seule possibilité, veut-il croire : « que le gouverneur de Pennsylvanie réinjecte une possibilité de recours. La cour fédérale peut aussi changer sa position. » Une pétition actuellement en ligne http://www.mumiabujamal.net/ a recueilli 20 000 signatures en faveur de Mumia Abu-Jamal. « Mais », précise M Hortaut, « seules 500 sont américaines. » 


 

 

 

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