Radios locales : inquiétantes perturbations sur les ondes du réseau EPRA

170 radios locales, dont une dizaine dans le Nord-Pas de Calais, sont concernées par l’absence de budget de ce groupement d’intérêt public pour 2012, l’année de ses 20 ans

« Près de 211 journalistes, producteurs et auteurs des radios locales associatives en cessation d’activité ?  ». Le SNJ-CGT alertait en janvier dernier sur la situation de l’EPRA, banque d’Echanges et Productions Radiophoniques unique en Europe qui alimente 170 stations locales en France, dont une dizaine dans le Nord-Pas de Calais (1). Avec cette particularité de valoriser « expression des populations des quartiers populaires, lutte contre le racisme et toutes les formes de discriminations », rappelle le syndicat de journalistes. Ainsi l’EPRA offre aux radios locales adhérentes « un outil au service de projets radiophoniques de qualité qu’elles n’auraient pas été en capacité de produire seules », souligne René Lavergne, de Radio Campus. Créée en 1992 avec l’appui à l’époque des ministères des Affaires Sociales de la Santé et de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, de la Culture et de la Communication, de Radio France Internationale et de l’Institut du Monde Arabe, de la Confédération nationale des radios associatives (CNRA), l’EPRA a fait preuve d’une exigence qui « a permis aux radios associatives de monter en qualité, et de pouvoir bénéficier d’une reconnaissance de nos partenaires et de nos auditeurs, de gagner en efficacité, de se construire un patrimoine sonore et un vivier de compétences », observe René Lavergne. En cette année de son vingtième anniversaire, ceci peut être remis en cause, l’avenir se présente des plus sombres pour plus de 200 producteurs radiophoniques, tel Stéphane Gravier, journaliste pigiste pour Agora FM radio locale dans les Alpes-Maritimes, dont la contribution à l’EPRA représente 40 % de son activité.

En effet, mise en difficulté depuis mi-2011 avec une première baisse de subventions et sans président depuis cette époque, l’EPRA n’a plus aucun budget depuis le début de l’année et n’est plus en mesure de financer l’achat de programmes depuis le 9 janvier. Certes, un arrêté ministériel a prorogé son existence jusqu’au 31 décembre 2012. Mais le ministre de la Ville, Maurice Leroy, a annoncé que « le renforcement de la contrainte budgétaire en 2012 imposera malheureusement une nouvelle réduction du budget de l’EPRA, mais de moindre ampleur » et rien ne se passe depuis conduisant le SNJ-CGT à s’interroger « sur la volonté du gouvernement de vouloir maintenir l’existence de l’EPRA, de lui assurer les moyens de son fonctionnement et de préserver l’emploi ».

René Lavergne, l’un des créateurs de Radio Campus Lille, ancien président de la FRANF, était l’invité du Club le 17 mars 2008.

C.A. convoqué puis reporté

« C’est gravissime parce que la situation n’a pas été traitée en temps et en heure. Au minimum on s’interroge sur la volonté de traiter le problème, au pire sur une volonté de nuire », estime René Lavergne. Ce dernier pointe également l’attitude de la direction de l’EPRA, faisant remarquer que, « en dépit des propos rassurants, on a déjà amputé l’année de 4 mois de production/échange au minimum », creusé « un trou dans l’histoire sociale et culturelle de notre pays, à un moment où pourtant beaucoup de choses ont à être dites et expliquées ». Le représentant de Radio Campus insiste sur « le besoin de partager, de fédérer et de former les personnes qui nourrissent les radios en programmes à contenus sociétaux », considérant que « dans ce contexte l’argent n’est qu’un moyen ». Il en appelle à la vigilance des radios « sur ces bases, au sein du C.A. de l’EPRA » et les invite à faire valoir « plus explicitement leur souhait de contribuer à un enrichissement qualitatif et collectif de nos projets radiophoniques ».

Dans l’immédiat cependant, début février, le ministre promettait la convocation prochaine d’un conseil d’administration devant permettre de « voter le budget 2012 et d’élire un président » ; il assurait « que le Groupement d’intérêt public EPRA disposera de moyens de fonctionnement suffisants pour l’année 2012.  » Mais les représentants des radios n’étaient convoqués qu’en qualité « d’observateurs », dénonçait le président de la CNRA, Hervé Dujardin. Seuls les représentants des ministères ayant pouvoir de décision. Finalement, la réunion du C.A. prévue pour le 15 mars a été repoussée à une date ultérieure… accentuant les craintes quant à l’avenir de l’EPRA.

M.D.

1) Radio Campus, Radio Pastel, Canal FM, Radio Rencontre, Radio Scarpe-Sensée, PFM Arras, RPL Lambersart, notamment


 

 

 

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