Il n’y a guère que Cécile Debachy, dans la Voix du Nord de samedi, pour revenir sur les « Indignés » de la place Richebé à Lille, en dressant le portrait d’Arnaud, 22 ans, étudiant à Sciences Po Lille, qui n’a pour sa part jamais dormi sur place, au pied de la statue de Faidherbe. « Il n’y a pas de petit soutien, déclare-t-il. Une journée ou cinq minutes suffisent. Le camp n’est pas une fin en soi, c’est un moyen. Être là est déjà une preuve de mobilisation ». Et la journaliste de la Voix s’est inquiétée de savoir ce que pensait la ville de Lille de ce campement improvisé. « L’image est inhabituelle et suscite forcément l’attention. Mais qu’en est-il de la législation ? Les tentes, ponctuellement installées, et les dizaines de pancartes peuvent-elles perdurer ? Les « Indignés » de la place Richebé peuvent-ils espérer poursuivre leur action ? Du coté de la ville, si aucune autorisation de camper n’a été délivrée, on soutient le mouvement, dans certaines mesures. “Nous regardons avec bienveillance cette agora informelle où les gens utilisent l’espace public pour débattre, souligne Eric Quiquet, adjoint en charge des places publiques. Mais nous ne sommes pas pour un camping en place Richebé.“… ».
Cocotier
En revanche, on cherche en vain dans les journaux de ce week end un retour sur la double « affaire Luc Ferry ». Dans son « clin d’œil » hebdomadaire de la Croix, Pierre Faure évoque (sans citer son nom) « un (ancien) patron du FMI, un (ancien) secrétaire d’Etat à la Fonction Publique, un autre (ancien) ministre trop — ou pas assez — bavard : à tour de rôle, ces personnages ont accaparé la scène médiatique ces dernières semaines. Les temps sont durs pour les élites, ou du moins pour ceux que l’on qualifie ainsi ». Dans Liberté Hebdo, seul le chroniqueur Jérôme Leroy est là pour stigmatiser le « philosophe ». « Comme dit justement le proverbe sénégalais, quand le singe veut monter au sommet du cocotier, il vaut mieux qu’il ait le cul propre. Ce qui n’est manifestement pas le cas, notamment quand on pense à Luc Ferry, qui fait la grosse balance sur les plateaux télé mais se dégonfle devant les flics. En plus, on apprend que notre philosophe-ex ministre, en cette période de suppression de postes dans l’Education nationale, vient de recevoir une lettre du président de l’université de Paris VII. Ferry touche en effet un salaire de cinq mille euros depuis septembre 2010 pour des cours qu’il n’a toujours pas donnés ».
Dans une double page, Nord-Eclair de samedi recueille les propos de Jean-Marc Chotteau, directeur du Théâtre de la Virgule, à Tourcoing, qui présente “HLM-Habiter la mémoire“, une déambulation théâtrale dans un authentique immeuble promis à la démolition, inspirée de paroles d’habitants. Un spectacle dans le quartier Belencontre de Tourcoing, en pleine rénovation urbaine, du 14 au 25 juin. Interrogé par Vincent Decaudin et Jean-François Rebischung, l’artiste déclare : « Quand on fait une bonne bouffe, on veut qu’il y ait le plus de monde autour de la table. Quand on fait du théâtre, c’est pareil : il doit être vu par le maximum de gens. Le théâtre, c’est pour tout le monde (…) Ça va déstabiliser le spectateur, ajoute-t-il, lui faire changer de point de vue sur les HLM. La tour où se joue le spectacle s’appelle Euclide, celui à qui l’on doit la théorie sur les parallèles. Eh bien j’emmène les spectateurs dans un monde parallèle. C’est une heure de traversée d’un monde parallèle : celui de la HLM ! ».
Chotteau a déjà créé des spectacles dans une bourloire, une friche industrielle, un gallodrome, nos confrères lui demandent s’il a besoin de ce genre de défi : « J’aime ces montées d’adrénaline. Je raconte toujours des coups de cœur ou des coups de gueule. J’ai envie de parler de choses qui me touchent. On se sert de lieux qui ont une âme, une histoire, plus que n’importe quel décor de théâtre. Les gens ne s’imaginent pas qu’ils peuvent être les héros d’une histoire. C’est encore plus passionnant de travailler avec eux, de réécrire à partir de ce magnifique matériau. Pour moi, ce n’est pas un défi, c’est un bonheur ».
Le bonheur, c’est aussi les vacances. Quand on peut s’en payer. Dans la Voix du Nord de samedi, Virginie Énée évoque la fin de vingt ans d’interdiction de baignade à Boulogne. « La partie était loin d’être gagnée. Vingt ans pile que cette plage de ville, coincée entre le port, la zone industrielle de Capécure et l’embouchure de la Liane, est considérée comme trop polluée (…) Un enjeu financier bien mesuré par les autorités locales qui ont “avant tout travaillé pour améliorer la qualité de la Liane, puisqu’elle se jette inévitablement dans la mer“, reprend le maire. Des bassins de rétention et une station d’épuration flambant neuve ont notamment été créés... ».
« Où se baigner dans la région cet été pour éviter entérocoques, escheria coli et autres petites bêtes ?, s’interroge quant à lui Mathieu Hébert dans Liberté Hebdo. Partout ou presque ! A l’exception d’un site en eau douce (Saint-Laurent Blangy, près d’Arras), touché par une “pollution momentanée“, les analyses menées entre juin et septembre 2010 sur 50 sites de baignade montrent que 17 sites sont classées en bonne qualité, et 32 sites sont classés en qualité acceptable ».
Polémiques
Bérangère Barret, revient dans Nord Eclair du samedi, sur une mesure de l’ancien gouvernement Raffarin qui continue de faire polémique : la transformation du lundi de pentecôte en « journée de la solidarité ». « Depuis 2008 et des difficultés certaines à appliquer le dispositif, écrit notre consœur, les modalités de cette journée travaillée mais non payée sont fixées par accords d’entreprise. L’un des premiers problèmes que posait cette fameuse journée de solidarité était donc réglé… Mails il y en a eu d’autres. D’aucuns pointent son caractère inégal : seuls les employés sont appelés à sacrifier une journée de paye, en sont donc exonérés “professions libérales, agriculteurs, retraités…“, déplore Alain Villez, de l’Uriopss (Union régionale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux). Un premier rôle, celui de “solidarité nationale“, qui ne serait donc pas rempli.... ».
A l’occasion de la venue de Jean-François Copé et de l’organisation d’un meeting UMP à Marcq-en-Barœul, Bruno Cadez consacre son édito de Liberté Hebdo à deux polémiques concernant la réforme de l’Impôt sur la fortune et les propositions de changements du RSA. « La guerre ouverte contre les pauvres, initiée par un premier tir de Laurent Wauquiez dénonçant du haut de sa superbe le “cancer de l’assistanat“, a été relancée par Jean-François Copé de proposer aux bénéficiaires du RSA de travailler entre cinq et dix heures par semaine dans le domaine de l’aide à domicile ou dans des services publics locaux (…) Pendant que la chasse aux pauvres est déclarée, la reforme de l’Impôt sur la fortune va exonérer plusieurs centaines de milliers de riches et ôter 1,8 milliard d’euros aux recettes de l’Etat. Intérêt général dites-vous ? De qui se moque-t-on ? ».
L’hebdomadaire de la rue Inkermann revient sur la campagne de publicité (qui a coûté 1,3 millions d’euros) qui claironne que l’Education nationale recrute 17 000 personnes. « Elle mérite un sérieux décryptage, écrit Ludovic Finez. Tout d’abord le personnel de l’Education nationale ne comptera pas 17.000 personnes de plus à la rentrée prochaine mais… 16.000 de moins. Tout simplement car “dans le même temps, près de 34.000 postes d’enseignants et de CPE“ seront supprimés, rappelle le Snes-FSU dans un communiqué (…) “C’est de la propagande idéologique, un mensonge aux citoyens“, commente Pierre Laumenerch, secrétaire du SNUipp-FSU pour le Nord. Il pense voir dans cette campagne de communication l’effet des protestations des “élus locaux“ de droite, qui “en ont marre de perdre leurs sièges à cause d’une politique destructrice“ ».
« Un trait d’humour n’est jamais tout à fait gratuit », note Patrick Pépin dans son édito de Nord Eclair le 13 juin en faisant référence à « l’humour corrézien » de l’ancien président Chirac. Il en profite pour faire le tour du bal des prétendants (en en oubliant cependant quelques uns…) : « Hollande a pour l’instant besoin de se distinguer et d’exister par lui-même. La petite phrase n’intervient pas dans un contexte absolument neutre. Malgré l’affaire DSK, dont Nicolas Sarkozy attendait beaucoup en termes de popularité, la cote du chef de l’État ne bouge pas d’un iota. Et le scénario d’un 21 avril à l’envers semble s’incruster dans l’opinion publique. Marine Le Pen reste stable à des niveaux élevés. Et les candidats de gauche continuent de baliser leur place et leur rang. Toutefois, l’image que nous renvoient les sondages pour l’instant est faussée. Tant que Martine Aubry n’a pas fait savoir son intention, les enquêtes supputent plus qu’elles n’affirment ».
Et quid du concombre dans tout ça ? Dans sa chronique de la Voix du Nord intitulé « Le concombre de la discorde », Jean-Michel Bretonnier s’en prend à nos voisins d’outre-Rhin : « La bactérie tueuse ne venait pas de concombres espagnols mal lavés. Elle a proliféré dans une ferme allemande du nord du pays, écologique de surcroît ». Le chroniqueur semble en vouloir à Angela Merken de rompre avec le nucléaire d’ici à 2022 « sans aucune concertation avec ses partenaires européens (…) L’Allemagne d’aujourd’hui regarde le monde du haut de sa puissance économique, du haut de sa rigueur budgétaire, du haut de son exigence de qualité. Les bactéries viennent forcément d’ailleurs : l’énergie nucléaire ne peut être produite qu’à l’étranger ; le laxisme des pays du Sud ne peut être payé que par les pays du Sud. En revanche, les biens produits sur le sol allemand, selon les impeccables normes de qualité allemandes, doivent être massivement achetés par les consommateurs des marchés voisins ».
Plus philosophe et non sans humour, Pierre Faure s’interroge dans la Croix : « Est-il profil plus paisible que ce pacifique légume ? Dans la recherche effrénée d’un responsable des victimes de Hambourg, on cria aussitôt haro sur la cucurbitacée tueuse : la bactérie E.coli, c’était elle ! Personne, cette fois, pour rappeler le principe sacré (et rabâché) de la “présomption d’innocence“. Haché menu en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, le concombre ! Et pour défendre sa cause, pas le moindre avocat. La solidarité légumière se perd ».
Interdit
Chroniques de l’anti-Nord, suite. Le 9 juin, DailyNord note sur son site que « Roubaix [est] de nouveau pointée du doigt. Et cette fois, c’est France Soir qui met à l’honneur la deuxième ville de la région : elle a l’honneur de posséder l’une des quarante cités dites « sensibles » et « aux mains des voyous » de France, avec le quartier de l’Alma. Bon, pour la méthode de classement, on n’a pas trop compris les critères comme le note Nord Eclair [du 8 juin], mais Roubaix n’est pas la seule ville de la région visée : Tourcoing et La Bourgogne complètent le palmarès nordiste. En revanche, aucune nouvelle des Provinces-Françaises à Maubeuge, que TF1 avait pourtant fait passer pour un Bronx local il y a un an et demi ». En effet, selon France Soir daté du 9 juin, l’Alma et La Bourgogne seraient les deux quartiers les plus « sensibles » repérés sur quarante autres en France. Lire, à cet égard, notre édito.
Enfin, l’Avenir de l’Artois raconte comment il fut interdit de séjour à la conférence de presse du Front national organisée le 12 juin à Aix-Noulette. « Le Front national a réservé les étangs d’Aix, récemment ouverts, pour sa fête départementale qui se déroulera dimanche 12 juin à Aix-Noulette. Jean-Marie Le Pen en sera l’invité d’honneur. Avec une salle de 200 m² totalement indépendante pouvant accueillir jusqu’à 200 personnes assises, des étangs de pêche situés au bout d’un chemin, en dehors de la ville, accolé à un bois, le Front national a trouvé aux étangs un endroit calme. Mais la venue de Jean-Marie Le Pen s’est vite ébruitée dans le village et dans les alentours. “Ce sont des clients comme les autres. Ils nous ont sollicités pour avoir un parcours“, explique le propriétaire des étangs d’Aix. Quant à Alain Lefebvre, maire de la commune, cela lui est égal. “Cela se passe chez un privé. Ce qui est sûr, c’est que je n’irai pas“, ironise-t-il. Très vite, le Front national a également su que nous avions enquêté sur sa venue à Aix. Le secrétaire départemental du parti, Laurent Brice, très mécontent que nous ayons posé des questions (et donc fait notre travail) a interdit à L’Avenir de l’Artois d’être présent à la conférence de presse organisée le 12 juin, à 11h30, après nous y avoir invités. La liberté de la presse, une notion floue pour le Front national, épinglé à ce sujet plusieurs fois en France par l’association Reporters sans frontière ». Décidément, la haine est vraiment devenue ordinaire...
Gérard Rouy